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teau de pourpre, une coupe d’argent, ou quelques pièces de cuivre[1], satisfaisaient les souverains les plus opulens de la terre. Lorsque Rome eut englouti les trésors des nations, les Césars crurent qu’il était de leur grandeur, et même de leur politique, d’exercer envers les alliés de l’état une libéralité constante et réglée par une sage modération : ils secouraient la pauvreté des Barbares, honoraient leur mérite, et récompensaient leur fidélité. Ces marques volontaires de bonté ne paraissaient pas arrachées par la crainte ; elles venaient seulement de la générosité ou de la gratitude des Romains. Les amis et les supplians avaient des droits aux présens et aux subsides de l’empereur : ceux qui les réclamaient comme une dette[2] essuyaient un dur refus. [Mécontentement public.]Mais la clause d’un payement annuel à un ennemi vainqueur ne peut être regardée que comme un tribut ignominieux : les Romains, jusque-là maîtres du monde, n’avaient point encore été accoutumés à recevoir la loi d’une troupe de Barbares. Le prince qui, par une conces-

  1. Le riche monarque d’Égypte accepta avec joie et avec reconnaissance une chaise (sella), une robe (toga), et une coupe (patera) d’or du poids de cinq livres (Tite-Live, l. XXVII, 4). Quina millia æris (qui valaient environ dix-huit livres st. en monnaie de cuivre) étaient le présent ordinaire que la république donnait aux ambassadeurs étrangers. (Tite-Live, XXXI, 9.)
  2. Voyez quelle fut encore la fermeté d’un général romain sous le règne d’Alexandre Sévère. Excerpta legationum, p. 25, édition du Louvre.