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leurs mains la couronne du martyre. Constantin avait demandé une garde turque pour protéger les champs et les récoltes de ses sujets. Mahomet établit cette garde, mais le premier ordre qu’il lui donna fut de laisser paître librement les mulets et les chevaux du camp, et de défendre ses gens, s’ils étaient attaqués par les naturels du pays. Les gens de la suite d’un chef ottoman avaient abandonné la nuit leurs chevaux au milieu d’un champ de blé mûr ; le dommage irrita les Grecs, l’insulte acheva de les révolter, et plusieurs individus des deux nations périrent dans une rixe qui en fut la suite. Mahomet écouta les plaintes avec joie, et fit partir un détachement avec ordre d’exterminer les habitans du village. Les coupables avaient pris la fuite ; mais quarante moissonneurs, qui, comptant sur leur innocence, travaillaient en paix, tombèrent sous le fer des Turcs. [La guerre des Turcs, juin.]Jusqu’alors Constantinople avait reçu les Turcs qu’y amenaient le commerce et la curiosité ; à la première alarme, l’empereur ordonna de fermer les portes ; mais toujours occupé de la paix, il relâcha, le troisième jour, les Turcs qui s’y trouvaient[1], et son dernier message à Mahomet annonça la ferme résignation d’un chrétien et d’un guerrier. « Puisque ni les sermens, ni les traités, ni la soumission ne peu-

  1. Parmi les Turcs qui se trouvèrent à Constantinople lorsqu’on ferma les portes, il y avait quelques pages de Mahomet, si convaincus de son inflexible rigueur, qu’ils demandèrent qu’on leur coupât la tête si on leur ôtait les moyens d’être de retour au camp avant le coucher du soleil.