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terre infidèle. [Retour d’Urbain V. A. D. 1367, octobre 16. A. D. 1370, avril 17.]Urbain V vécut trois années au Vatican en sûreté et d’une manière honorable ; sa dignité était protégée par une garde de deux mille cavaliers, et il y reçut les félicitations du roi de Chypre, de la reine de Naples et des empereurs d’Orient et d’Occident ; mais bientôt la joie de Pétrarque et des Italiens fit place à la douleur et à l’indignation. Déterminé, soit par des motifs d’utilité publique ou particulière, par ses propres désirs ou par les prières des cardinaux, Urbain retourna en France, et l’élection très-prochaine de son successeur fut affranchie du tyrannique patriotisme des Romains. Les puissances du ciel s’intéressèrent à leur cause ; une sainte pèlerine, Brigitte de Suède, désapprouva le départ d’Urbain et prédit sa mort. Sainte Catherine de Sienne, l’épouse de Jésus-Christ et l’ambassadrice des Florentins, excita Grégoire XI à retourner à Rome ; [Grégoire XI rétablit enfin le saint siége à Rome. A. D. 1377, janv. 17.]et il paraît que les papes eux-mêmes, les grands fauteurs de la crédulité humaine, crurent aux visions de ces deux femmes[1]. Au reste, des raisons temporelles appuyaient ces avis du ciel. Des troupes ennemies entrées dans Avignon, y avaient outragé le saint

  1. Je n’ai pas le loisir de m’arrêter sur les légendes de sainte Brigitte et de sainte Catherine ; la dernière pourrait fournir quelques histoires amusantes. Leur effet sur l’esprit de Grégoire XI est attesté par le discours de ce pape au lit de la mort. Il avertit les assistans, ut caverent ab hominibus, sive viris, sive mulieribus, sub specie religionis loquentibus visiones sui capitis, quia per tales ipse seductus, etc. (Baluze, Not. ad vit. pap. Avenionensium, t. I, p. 1223).