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à la hâte une nouvelle constitution, et au douzième siècle Rome n’avait pas un antiquaire ou un législateur qui fût en état de développer ou de rétablir l’harmonie et les proportions de l’ancien modèle. L’assemblée générale d’un peuple libre et armé s’expliquera toujours par de bruyantes et imposantes acclamations. Il était difficile qu’une multitude aveugle, qui ne connaissait ni les formes ni les avantages d’un gouvernement bien combiné, adoptât cette division régulière des trente-cinq tribus, cet équilibre des centuries calculé d’après les fortunes, les débats des orateurs d’un système opposé, ni enfin la lente opération des suffrages donnés à haute voix ou au scrutin. Arnaud proposa de faire revivre l’ordre équestre ; mais quel pouvait être le motif et la mesure d’une pareille distinction[1] ? Il aurait fallu réduire, d’après la pauvreté qui régnait alors, la quotité de fortune nécessaire pour être membre de la classe des chevaliers : on avait plus besoin des fonctions civiles des juges et des fermiers du fisc ; les fiefs militaires et l’esprit de chevalerie suppléaient d’une manière plus noble au devoir primitif des individus de l’ordre équestre, c’est-à-dire au service de guerre qu’ils devaient faire à cheval. La jurisprudence de la répu-

  1. Dans l’ancienne Rome, l’ordre équestre ne devint une troisième branche de la république, composée simplement jusqu’alors du sénat et du peuple, que sous le consulat de Cicéron, qui se donne le mérite de cet établissement. (Pline, Hist. nat., XXXIII, 3 ; Beaufort, Républ. rom., t. I, p. 144-155.)