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Brescia eut le temps de jouir des effets de sa mission ou de les déplorer. Son règne dura plus de dix ans, durant lesquels deux papes, Innocent VI et Anastase IV, tremblèrent au milieu du Vatican, ou bien errèrent en exil dans les villes des environs. Un pontife plus ferme et plus heureux monta enfin sur le trône de saint Pierre. Ce fut Adrien IV[1], le seul Anglais qui ait porté la tiare, et qui, par son mérite, s’éleva du fond du monastère de Saint-Alban, de l’état de moine et presque de mendiant, à la chaire pontificale. Il se fit connaître dès la première insulte : un cardinal ayant été tué ou blessé dans la rue, il jeta un interdit sur le peuple de Rome : depuis Noël jusqu’à Pâques la ville fut privée des consolations réelles ou imaginaires du culte religieux. Les Romains avaient méprisé leur prince temporel ; ils se soumirent avec douleur et avec effroi aux censures de leur père spirituel ; ils expièrent leur crime par le repentir, et le bannissement du prédicateur séditieux fut le prix de leur absolution. Mais la vengeance d’Adrien n’était pas satisfaite, et le couronnement de Frédéric Barberousse, dont l’époque approchait, devint funeste au réformateur qui avait blessé, quoique dans une proportion différente, les chefs de l’Église et ceux de l’état. Le pape eut à Viterbe une entrevue avec l’empereur ; il lui peignit les séditieu-

  1. Le lecteur anglais peut consulter la Biographia britannica, article d’Adrien IV ; mais nos propres auteurs n’ont rien ajouté à la réputation ou au mérite de leur compatriote.