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temps comme un patriote, et ses dangereuses leçons ne tardèrent pas à produire le mécontentement ou la révolte de la ville de Brescia contre son évêque. Mais la faveur du peuple est moins durable que le ressentiment des prêtres ; et lorsqu’au concile général de Latran, Innocent II[1] eut condamné l’hérésie d’Arnaud, le préjugé et la crainte déterminèrent les magistrats eux-mêmes à exécuter le décret de l’Église. Le disciple d’Abeilard ne pouvait plus trouver d’asile en Italie ; il passa les Alpes et fut accueilli à Zurich, ville qui est aujourd’hui la capitale du premier des cantons suisses. Zurich, qui avait été d’abord une garnison romaine[2], ensuite une maison de campagne royale et un chapitre de filles nobles, était devenue peu à peu une cité libre et florissante, où les commissaires de l’empereur prononçaient quelquefois sur les appels des Milanais[3].

  1.     —Damnantus ab illo
    Præsule, qui numeros vetitum contingere nostros
    Nomen ab innocua ducit, laudabile vitâ.

    Il faut applaudir à l’adresse et à l’exactitude de Ligurinus, qui tire un compliment du nom anti-poétique d’Innocent II.

  2. On a trouvé à Zurich une inscription de Statio Turicensis, en lettres romaines (d’Anville, Notice de l’ancienne Gaule, p. 642-644) ; mais c’est sans preuves que la ville et le canton ont usurpé, et même se sont approprié exclusivement les noms de Tigurum et Pagus Tigurinas.
  3. Guilliman (De rebus helveticis, l. III, c. 5, p. 106) détaille la donation (A. D. 833) de l’empereur Louis-le-Pieux à l’abbesse Hildegarde sa fille. Curtim nostram Turegum in ducatu Alamanniœ in pago Durgaugensi, avec les