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corda à son rival les honneurs de la sépulture. L’empereur mort, Lucas Notaras, grand duc et premier ministre de l’empire[1], se trouvait être le plus important des prisonniers. On l’amena au pied du trône avec ses trésors : « Et pourquoi, lui dit le sultan indigné, n’avez-vous pas employé ces trésors à la défense de votre prince et de votre pays ? — Ils vous appartenaient, répondit l’esclave ; Dieu vous les avait réservés. — S’ils m’étaient réservés, répliqua le despote, pourquoi donc avez-vous eu l’audace de les retenir si long-temps, et de vous permettre une résistance si infructueuse et si funeste ? » Le grand duc allégua l’obstination des auxiliaires et quelques encouragemens secrets de la part du visir turc ; il sortit enfin de cette périlleuse entrevue, avec l’assurance qu’on lui pardonnait et qu’on protégerait ses jours. Mahomet alla voir la femme de Notaras, princesse âgée, accablée de douleurs et de maladies, et employa pour la consoler les plus tendres expressions d’humanité et de respect filial. Il eut la même clémence pour les principaux officiers de l’état ; il paya lui-même la rançon de plusieurs ; et durant

  1. Phranza était l’ennemi personnel du grand-duc, et ni le temps, ni la mort de cet ennemi, ni la retraite de Phranza dans un monastère, n’ont pu fermer son cœur à un mouvement d’intérêt ou de pardon. Ducas penche à louer le grand-duc comme martyr ; Chalcocondyles est neutre ; mais c’est lui qui nous fait entendre que les Grecs avaient formé une conspiration.