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chiré par des factions, et conquis par des étrangers ; mais les habitans sont courageux, robustes, renommés dans les armes et victorieux à la guerre. Leurs boucliers ressemblent à ceux des Italiens, et leur épée à celle des Grecs. Leurs principales forces consistent dans la supériorité de leurs archers. Leur langage n’a aucune affinité avec celui du continent ; mais leurs habitudes de vie diffèrent peu de celles des Français. On peut regarder le mépris de la chasteté des femmes et de l’honneur conjugal comme la principale singularité de leurs mœurs. Dans leurs visites réciproques, le premier acte d’hospitalité est de permettre à leurs hôtes les embrassemens de leurs femmes et de leurs filles. Entre amis, ils les empruntent et les prêtent sans honte, sans que personne soit blessé de cet étrange commerce et de ses suites inévitables[1]. » Instruits comme nous le sommes des usages de la vieille Angleterre, et sûrs de la vertu de nos mères, nous pouvons sourire de la crédulité, ou nous indigner de l’injustice de l’historien grec, qui a confondu sans doute un baiser[2] décent

  1. En admettant que le double sens du verbe Κυω (osculor et in utero gero) fût susceptible d’une équivoque, on ne pourrait pas douter de l’erreur et du sens de Chalcocondyles, d’après la pieuse horreur qu’il annonce pour cet usage barbare (p. 49).
  2. Érasme (epist. Fausto Andrelino) parle d’une manière agréable de la mode anglaise de baiser les étrangers à leur arrivée et à leur départ, mais n’en tire aucune mauvaise supposition.