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et la paresse. Sa vanité put enrichir la tiare d’une troisième couronne ; mais il était également inhabile à gouverner un royaume ou l’Église.

Négociation de Cantacuzène avec Clément VI. A. D. 1348.

Après la mort d’Andronic, les Grecs, en proie aux guerres civiles, ne purent s’occuper de la réunion générale des chrétiens. Mais dès que Cantacuzène eut pardonné à ses ennemis vaincus, il entreprit de justifier ou au moins d’atténuer la faute qu’il avait commise en introduisant les Turcs dans l’Europe, et en mariant sa fille à un prince musulman. Deux de ses ministres, accompagnés d’un interprète latin, se rendirent par ses ordres à la cour du pontife romain, transplantée dans la ville d’Avignon, sur les bords du Rhône, où elle resta durant soixante-dix ans. Ils représentèrent la dure nécessité qui les avait forcés d’embrasser l’alliance des infidèles, et firent entendre par son ordre les mots spécieux et édifians de croisade et d’union. Le pape Clément VI[1], successeur de Benoît XII, leur fit une réception affable et honorable, parut touché des malheurs de Cantacuzène, convaincu de son mérite, persuadé de son innocence, et parfaitement instruit

  1. Voyez les Vies originales de Clément VI, dans Muratori (Script. rerum italicar., t. III, part. II, p. 550-589) ; Matthieu Villani (Chron., l. III, c. 43, in Muratori, t. XIV, p. 186), qui le nomme molto cavallaresco, poco religioso ; Fleury (Hist. ecclés., t. XX, p. 126), et la Vie de Pétrarque (t. II, p. 42-45). L’abbé de Sade lui accorde plus d’indulgence ; mais ce dernier auteur était gentilhomme aussi-bien que prêtre.