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Histoire de la cage de fer.

Les écrivains modernes rejettent comme une fable adoptée par la crédulité[1], l’histoire, si long-temps répétée comme une leçon morale, de la cage de fer dans laquelle Tamerlan fit enfermer Bajazet [Contraire au récit de l’historien persan de Timour.]Ils en appellent avec confiance à l’histoire persane de Sherefeddin Ali, dont nous avons aujourd’hui une traduction française, et dont je vais extraire et abréger la relation plus vraisemblable de ce mémorable événement. Timour, informé que le sultan captif était à l’entrée de sa tente, sortit pour le recevoir, le fit asseoir à ses côtes, et joignant à de justes reproches un ton de considération pour son rang et de pitié pour ses malheurs : « Hélas ! lui dit l’empereur, c’est par votre faute que le décret du destin s’est accompli ; c’est le filet que vous avez tissé ; ce sont les épines de l’arbre que vous avez planté. Je désirais épargner et même secourir le champion des musulmans ; vous avez bravé nos menaces et dédaigné notre amitié ; vous nous avez forcé d’entrer dans vos états à la tête de nos armées invincibles. Considérez

    quelques faits tirés des Institutions au récit de Sherefeddin (l. V, c. 44-65) et d’Arabshah (t. II, c. 20-35). Pour cette partie seulement de l’histoire de Timour, on peut citer les historiens turcs (Cantemir, p. 53-55 ; Annales de Leunclav., p. 320-322), et les Grecs (Phranza, l. I, c. 29 ; Ducas, c. 15-17 ; Chalcocondyles, l. III).

  1. Le scepticisme de Voltaire, dans son Essai sur l’Histoire générale (c. 88), est disposé ici, comme dans toutes les autres occasions, à rejeter ce conte populaire, et à diminuer de l’excès du vice et de la grandeur de la vertu : son incrédulité est souvent raisonnable.