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en combattant contre les infidèles, est la seule considération qui nous empêche de détruire ton pays, la frontière et le boulevard du monde musulman. Sois sage tandis qu’il en est temps ; réfléchis, repens-toi, et détourne le tonnerre de notre vengeance, encore suspendu sur ta tête. Toi qui n’es qu’une fourmi, pourquoi veux-tu chercher à irriter les éléphans ; hélas ! ils t’écraseront sous leurs pieds. » La réponse de Bajazet respirait l’indignation d’une âme profondément blessée d’un mépris auquel elle n’était pas accoutumée. Après avoir traité Timour de brigand et de rebelle du désert, il récapitule ses victoires tant vantées dans l’Iran, le Touran et les Indes, et s’efforce de prouver que Timour n’a jamais triomphé que par la perfidie et les vices de ses adversaires. « Tes armées sont innombrables, je veux le croire ; mais oses-tu comparer les flèches de tes Tartares, toujours fuyans, aux sabres de mes intrépides et invincibles janissaires ? Je défendrai toujours les princes qui ont imploré ma protection ; viens les chercher sous mes tentes. Les villes d’Erzeroum et d’Arzingan m’appartiennent ; et si elles ne me payent pas exactement leur tribut, j’en irai demander les arrérages sous les murs de Tauris et de Sultanie. » L’excès de la colère arracha au sultan une injure plus personnelle. « Si je fuis devant toi, puissent mes femmes être éloignées de mon lit par trois divorces ! mais si tu n’as pas le courage de m’attendre dans la plaine, puisse-tu recevoir les tiennes après qu’elles auront satisfait trois fois les désirs d’un