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moyen efficace de soumettre ces tribus sauvages au joug des mœurs et des lois. Par l’ordre d’Isaac, on les priva de leur unique moyen de subsistance en leur enlevant leurs troupeaux pour servir à la pompe des fêtes nuptiales du souverain, et le refus d’une égalité de paye et de rang dans le service militaire, acheva d’aliéner ces guerriers indociles. Pierre et Asan, deux chefs puissans de la race des anciens rois[1], défendirent leurs droits et la liberté nationale : les énergumènes qui leur servaient de prédicateurs annoncèrent au peuple que le glorieux saint Demetrius, leur patron, avait abandonné pour toujours le parti des Grecs ; et la rebellion s’étendit des bords du Danube aux montagnes de la Thrace et de la Macédoine. Après quelques efforts impuissans, Isaac Lange et son frère reconnurent leur indépendance, et les troupes impériales furent bientôt découragées par la vue des ossemens de leurs camarades, dispersés le long des passages du mont Hœmus. La valeur et la politique de Jean ou Joannice établirent solidement le second royaume des Bulgares. Ce rusé Barbare envoya une ambassade à Innocent III. Il se reconnut enfant de Rome par la naissance et la religion[2],

  1. Ducange, Fam. dalmat., p. 318, 319, 320. La correspondance du pontife romain avec le roi des Bulgares se trouve dans les Gesta Innocent. III, c. 66-82, p. 513-525.
  2. Le pape reconnait son origine, a nobili urbis Romæ prosopiâ genitores tui originem traxerunt. M. d’Anville (États de l’Europe, p. 258-262) explique cette tradition et la forte ressemblance de la langue latine avec l’idiome de