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de revenir chargé des dépouilles sacrées des reliques de la Grèce et de la Palestine[1] et chacune de ces reliques était précédée et suivie d’une multitude de miracles et de visions ; la foi des catholiques fut altérée par de nouvelles légendes, et leur pratique par de nouvelles superstitions. La guerre sainte fut la source funeste qui produisit l’établissement de l’inquisition, les moines mendians, les progrès définitifs de l’idolâtrie, et l’excès de l’abus des indulgences. L’esprit actif des Latins cherchait à se satisfaire aux dépens de leur raison et de leur religion ; et si l’ignorance et l’obscurité régnèrent dans les neuvième et dixième siècles, on peut dire aussi que les treizième et quatorzième furent le temps des fables et des absurdités.

Les peuples du Nord qui conquirent l’Empire romain, en adoptant le christianisme, en cultivant une terre fertile, se mêlèrent insensiblement avec les provinciaux, et réchauffèrent les cendres des arts de l’antiquité. Vers le siècle de Charlemagne, leurs établissemens avaient acquis un certain degré d’ordre et de stabilité, lorsque les invasions des Normands, des Sarrasins[2] et des Hongrois, nouveaux essaims

  1. Telle était l’opinion du grand Leibnitz (Œuvres de Fontenelle, t. V, p. 458), un des maîtres de l’histoire du moyen âge. Je ne citerai que la généalogie des Carmélites et le miracle de la maison de Lorette, qui vinrent l’une et l’autre de Palestine.
  2. Si je place les Sarrasins au nombre des nations barbares, ce n’est que relativement à leurs guerres, ou plutôt