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sujets, et ils implorèrent la protection du prince grec, son seigneur suzerain. Après quelque résistance, il réunit le royaume de Thessalonique à celui de Nicée ; et Vatacès régna sans compétiteur depuis les frontières de la Turquie jusqu’au golfe Adriatique. Les princes d’Europe respectaient son mérite et sa puissance ; s’il eût voulu souscrire à la foi orthodoxe, il est probable que le pape aurait abandonné sans regret l’empereur latin de Constantinople ; mais la mort de Vatacès, le règne court et troublé de son fils Théodore et la minorité de Jean son petit-fils, suspendirent le rétablissement des Grecs. Dans le chapitre suivant, je rendrai compte de leurs révolutions intérieures ; il suffira d’observer ici que le jeune prince succomba sous l’ambition de son tuteur et de son collègue, Michel Paléologue, qui déploya le mélange de vices et de vertus ordinaire aux fondateurs d’une nouvelle dynastie. L’empereur Baudouin s’était flatté qu’une négociation que ne soutenait aucune force lui ferait recouvrer quelques provinces ou quelques villes. Ses ambassadeurs furent renvoyés de Nicée avec mépris et avec d’insultantes railleries : à chaque province qu’ils nommaient, Paléologue alléguait un prétexte qui l’obligeait à la conserver ; il était né dans l’une, il avait été élevé dans une autre au commandement militaire, il avait joui et se proposait de jouir long-temps, dans la troisième, des plaisirs de la chasse. « Et que vous proposez-vous donc de nous rendre ? lui demandèrent les ambassadeurs étonnés. — Rien, leur répondit le