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il conduisit cent mille Latins à la conquête de l’Égypte, et acheva la prise de Damiette : on attribua unanimement le revers dont elle fut suivie à l’avarice et à l’orgueil du légat. Après le mariage de sa fille avec Frédéric II[1], l’ingratitude de l’empereur lui fit accepter le commandement des troupes de l’Église ; quoique âgé et privé de sa couronne, le brave et généreux Jean de Brienne était toujours prêt à tirer son épée pour le service de la chrétienté. Durant les sept années du règne de son frère, Baudouin de Courtenai n’était point encore sorti de l’enfance, et les barons de la Romanie sentaient la nécessité de placer le sceptre entre les mains d’un homme et d’un héros. Le vénérable roi de Jérusalem aurait dédaigné le nom et l’office de régent ; ils convinrent de l’investir pour sa vie du titre et des prérogatives d’empereur, sous la seule condition qu’il donnerait à Baudouin sa seconde fille pour épouse ; et que, dans la maturité de son âge, ce jeune prince succéderait au trône de Constantinople. Le choix de Jean de Brienne, sa réputation et sa présence, ranimèrent l’espérance des Grecs et des Latins. Ils admirèrent l’air martial, la vigueur[2] d’un vieillard âgé de

  1. Giannone (Istoria civile, t. II, l. XVI, p. 380-385) discute le mariage de Frédéric II avec la fille de Jean de Brienne, et la double union des couronnes de Naples et de Jérusalem.
  2. Acropolita, c. 27. L’historien était alors un enfant, et il fut élevé à Constantinople. En 1223, il avait onze ans, lorsque son père, pour échapper au joug des Latins, aban-