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un corps de quatorze mille Comans, tirés des déserts de la Scythie, qui buvaient, dit-on, le sang de leurs captifs, et sacrifiaient les chrétiens sur les autels de leurs divinités[1].

Alarmé de cette révolte, l’empereur dépêcha un courrier pour rappeler son frère Henri ; et si Baudouin eût attendu le retour de ce valeureux prince, qui devait lui ramener un secours de vingt mille Arméniens, il aurait pu attaquer le roi des Bulgares avec l’égalité du nombre et la supériorité décisive des armes et de la discipline. Mais l’esprit de la chevalerie ne savait point distinguer la prudence de la lâcheté. L’empereur parut dans la plaine avec cent quarante chevaliers et leur suite ordinaire de sergens et d’archers. Après d’inutiles représentations, le maréchal obéit et conduisit l’avant-garde sur la route d’Andrinople ; le comte de Blois commandait le corps de bataille, le vieux doge suivait à l’arrière-garde. Les Latins fugitifs accoururent de toutes parts sous les drapeaux de cette petite armée ; ils entreprirent le siége d’Andrinople ; et telles étaient les pieuses dispositions des croisés, qu’ils s’occupèrent, durant la semaine sainte, à piller la campagne pour leur subsistance, et à construire des machines destinées à la

  1. Les Comans étaient une horde de Tartares ou de Turcomans, qui campaient, dans les douzième et treizième siècles, sur les frontières de la Moldavie. Il y avait parmi eux un grand nombre de païens et quelques mahométans. Toute la horde fut convertie au christianisme (A. D. 1370) par Louis, roi de Hongrie.