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l’ancienne et véritable Grèce reçut encore un conquérant latin[1], qui foula cette terre classique d’un pied indifférent. Les beautés de la vallée de Tempé attirèrent à peine ses regards ; il traversa avec précaution le passage étroit des Thermopyles, occupa Thèbes, Athènes et Argos, villes inconnues pour lui, et prit d’assaut Corinthe et Napoli[2], qui avaient essayé de lui résister. Les lots des pèlerins latins furent réglés par le sort, ou le choix, et des échanges successifs. Dans la joie de leur triomphe, ils abusèrent sans modération de leur pouvoir sur la vie et la fortune d’un grand nombre d’hommes. Après un examen exact des provinces, ils pesèrent dans la balance de l’avarice le revenu de chaque district, la situation plus ou moins avantageuse, et les ressources plus ou moins abondantes pour la subsistance des hom-

  1. Villehardouin (nos 159, 160, 173-177) et Nicétas (p. 387-394) racontent l’expédition du marquis Boniface dans la Grèce. Le citoyen de Chones a pu tenir ces détails de son frère Michel, archevêque d’Athènes, qu’il représente comme un orateur éloquent, un homme d’état habile, et par-dessus tout comme un saint. On aurait pu tirer des manuscrits de Nicétas qui se trouvent à la Bibliothéque Bodléienne, son éloge d’Athènes et sa description de Tempé (Fabricius, Bibl. græc., t. VI, p. 405), et elles auraient mérité d’occuper les recherches de M. Harris.
  2. Napoli de Romanie ou Nauplia, l’ancien port de mer d’Argos, est encore une place forte considérable ; elle est assise sur une péninsule environnée de rochers, et a un bon port. Voyez les Voyages de Chandler dans la Grèce, p. 227.