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Les fils de Ruric régnaient sur la vaste province de Wolodimir, ou Moscow ; et s’ils étaient resserrés de ce côté par les hordes de l’Orient, leur empire se prolongeait vers l’occident jusqu’à la mer Baltique et à la Prusse. Du côté du nord, il s’étendait par-delà le soixantième degré de latitude sur ces régions hyperboréennes que notre imagination a remplies de monstres ou couvertes d’une nuit éternelle. Ils suivaient du côté du sud le cours du Borysthène jusque dans le voisinage de l’Euxin. Les tribus établies ou errantes dans cette vaste enceinte obéissaient au même vainqueur, et formèrent peu à peu une même nation. La langue russe actuelle est un dialecte de l’esclavonne ; mais au dixième siècle, ces deux idiomes étaient bien distincts, et l’esclavon ayant prévalu au midi, il y a lieu de croire que les Russes du Nord, subjugués d’abord par le général varangien, faisaient partie de la race finnique. Les migrations, l’union ou la séparation des tribus errantes ont changé sans cesse le mobile tableau du désert de la Scythie ; mais on trouve sur la plus ancienne carte de la Russie des lieux qui n’ont pas changé de nom, Novogorod[1] et

  1. M. Lévesque (Histoire de Russie, t. I, p. 60) attribue même aux temps qui précédèrent le règne de Ruric cet orgueilleux proverbe : « Qui peut résister à Dieu et à la grande Novogorod ? » Dans le cours de son histoire, il parle souvent de cette république enfin détruite, A. D. 1475 (t. II, p. 252-266). Un voyageur exact, Adam Olearius, décrit