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pléèrent au défaut de paye par le pillage de plusieurs villages mahométans. Dix-neuf marchands syriens qui commerçaient sur la foi publique, furent dépouillés et pendus par les chrétiens ; et le refus d’une satisfaction équitable justifia les hostilités du sultan Khalil. Il s’avança vers la ville, à la tête de soixante mille chevaux et de cent quarante mille hommes d’infanterie. Son train d’artillerie, si je puis me servir de cette expression, était puissant et nombreux. Il fallut cent charriots pour transporter les pièces de bois dont se composait une seule machine : l’historien Abulféda, qui servait dans les troupes de Hamah, fut lui-même témoin de cette sainte guerre. Quels que fussent les vices des Francs, l’enthousiasme et le désespoir ranimèrent leur courage ; mais, déchirés par les discordes de leurs dix-sept chefs, ils furent accablés de tous côtés par les forces du sultan. [Perte d’Acre et de la Terre-Sainte. A. D. 1291. 18 mai.]Après un siége de trente-trois jours, les musulmans forcèrent le double mur. Leurs machines détruisirent la principale tour ; les mamelucks donnèrent un assaut général, la ville fut emportée, et soixante mille chrétiens périrent ou tombèrent dans l’esclavage. Le couvent ou plutôt la forteresse des Templiers tint encore durant trois jours ; mais une flèche blessa mortellement le grand-maître, et de cinq cents chevaliers, dix seulement conservèrent la vie, moins heureux que les victimes des combats, si le sort les réservait à partager, sur un échafaud, l’injuste et cruelle proscription de leur ordre. Le roi de Jérusalem, le patriarche et le grand--