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être regardée en Asie comme une calamité. Après la prise de cette ville, les Syriens fugitifs répandirent au loin la consternation ; Bagdad pleura prosternée dans la poussière. Zeineddin, cadi de Damas s’arracha la barbe en présence du calife ; et tout le divan répandit des larmes au récit de cette triste aventure[1]. Mais les commandeurs des fidèles, captifs eux-mêmes entre les mains des Turcs, ne pouvaient offrir que des larmes. Dans le dernier siècle des Abbassides, leur puissance temporelle se rétablit un peu ; mais elle était bornée à la ville de Bagdad et aux provinces des environs. Leurs tyrans, les descendans de Seljouk, avaient éprouvé, comme toutes les dynasties asiatiques, les vicissitudes de la valeur, de la puissance, de la discorde, de la faiblesse et de la décadence. Leurs forces ni leur courage ne suffisaient pas à la défense de la religion ; et Sangiar, le dernier héros de leur race, retiré au fond de la Perse, n’était pas même connu de nom des chrétiens orientaux[2]. [Les Atabeks de Syrie.]Tandis que les faibles sultans languis-

  1. Abul-Mahazen, apud de Guignes, Histoire des Huns, t. II, part. II, p. 99.
  2. Voyez son article dans la Bibliothéque orientale de d’Herbelot et de Guignes, t. II, part. I, p. 230-261. Sa valeur brillante le fit surnommer le second Alexandre, et tel était l’excès d’amour que lui portèrent ses sujets, qu’ils prièrent pour le sultan durant une année entière après sa mort. Cependant Sangiar aurait pu être fait prisonnier par les chrétiens aussi bien que par les Uzes. Il régna près de cinquante ans (A. D. 1103-1152), et fut le patron généreux des poètes de la Perse.