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conquérant. Dans la défense d’un pays que les Turcs considéraient comme leur propriété légitime, Soliman mérita les éloges de ses ennemis, qui seuls l’ont fait connaître à la postérité. Cédant à la première impétuosité du torrent, il déposa dans Nicée sa famille et ses trésors, et il se retira dans les montagnes, suivi de cinquante mille cavaliers ; il en descendit deux fois pour attaquer les assiégeans, dont le camp formait un cercle imparfait d’environ six milles. La ville de Nicée était environnée de murs hauts et solides, flanqués de trois cent soixante-dix tours, et couverts par un fossé profond. Les musulmans qui la défendaient, placés sur les limites de la chrétienté, étaient braves, disciplinés et pleins de zèle pour leur religion. Les princes français prirent leur poste devant cette ville, et suivirent leurs attaques sans se communiquer entre eux, et sans les soumettre à un plan général. L’émulation animait leur valeur ; mais cette valeur était souillée par la cruauté, et l’émulation dégénérait en envie et en discorde. Les Latins employèrent au siége de Nicée toutes les machines de guerre connues de l’antiquité ; les mines, les béliers, les tortues, les befrois ou les tours roulantes, les balistes, les feux d’artifice, les catapultes, les frondes et les arbalètes qui lançaient des pierres et des dards[1]. En cinq semaines

    fort secs et fort concis relativement à la première croisade (De Guignes, t. III, part. II, p. 10-30).

  1. Pour les fortifications, les machines et les siéges du moyen âge, consultez Muratori (Antiq. Ital., t. II, Dissert.