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ragèrent un rapport qui augmentait à la fois la haine et la terreur des infidèles[1].

Siége de Nicée. A. D. 1097. Mai 14. Juin 20.

Je me suis étendu avec plaisir sur les premières démarches des croisés, parce qu’elles peignent les mœurs et le caractère des Européens ; mais j’abrégerai le récit fatigant et monotone d’exploits obscurs exécutés par la force et décrits par l’ignorance. De leur premier poste aux environs de Nicomédie, ils s’avancèrent par divisions successives, sortirent des étroites limites de l’empire grec, s’ouvrirent une route à travers les montagnes, et commencèrent leur pieuse guerre contre le sultan des Turcs par le siége de sa capitale. Son royaume de Roum s’étendait depuis l’Hellespont jusqu’aux frontières de la Syrie, et barrait le chemin aux pèlerins de Jérusalem : il se nommait Kilidge-Arslan, ou Soliman[2] ; il était issu de la race de Seljouk, et fils du premier

  1. Cette faim de cannibale, quelquefois réelle et plus souvent un mensonge et un artifice, est affirmée par Anne Comnène (Alex., l. x, p. 288), Guibert (p. 546), Radulp. Cadom. (c. 97). L’auteur des Gesta Francorum, le moine Robert, Baldric et Raimond d’Agiles racontent ce stratagème dans le siége et la famine d’Antioche.
  2. Les Latins le désignent par le nom de Soliman, qui est celui que lui donnaient les musulmans ; et son caractère a été fort embelli par le Tasse. Les Turcs le nommaient Kilidge-Arslan (A. H. 485-500, A. D. 1092-1106. Voyez de Guignes, ses Tables, t. I, p. 245.) Les Orientaux se servaient de ce nom, et les Grecs l’employaient aussi avec quelque corruption : mais on ne trouve guère que son nom dans les histoires des Mahométans, dont les écrivains sont