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vrit bientôt que des milliers de catholiques des deux sexes et de tous les rangs avaient embrassé le manichéisme ; les flammes qui consumèrent douze chanoines d’Orléans, furent le premier acte de la persécution. Les Bulgares[1], dont le nom si innocent dans son origine est devenu si odieux dans ses applications, se répandirent sur toute la surface de l’Europe. Unis dans leur haine commune pour l’idolâtrie et pour Rome, ils obéissaient à une sorte de gouvernement épiscopal ou presbytérien ; des nuances plus ou moins fortes de théologie scolastique distinguaient les différentes sectes ; mais en général, toutes admettaient les deux principes, méprisaient l’ancien Testament, et niaient l’existence réelle du

    gligé un passage curieux de Guillaume de la Pouille, qui les montre d’une manière très-claire dans une bataille entre les Grecs et les Normands. A. D. 1040 (in Muratori, Script. rerum italic., t. V, p. 256) :

    Cum Græcis aderant, quidam, quos pessimus error,
    Fecerat amentes et ab ipso nomen habebant.


    Mais il connaît si peu leur doctrine, qu’il en fait une espèce de sabellianisme ou de patripassianisme.

  1. Le nom de Bulgari, B—ulgres, B—ugres, désignait un peuple ; les Français en ont fait un terme de reproche, qu’ils ont appliqué tour à tour aux usuriers et à ceux qui se livrent au péché contre nature. Ou a donné celui de Paterini ou Patelini à l’hypocrite qui a une langue flatteuse et emmiellée, tel que le principal personnage de la farce originale et plaisante de l’avocat Patelin (Ducange, Gloss. latin. medii et infimi ævi). Les manichéens étaient aussi nommés Cathari ou les Purs, par corruption Gazari, etc.