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par l’activité de son frère Guillaume-le-Roux. Une légèreté de caractère et une faiblesse excessive effaçaient les qualités estimables de Robert. Sa gaîté naturelle le livrait aux plaisirs ; sa profession ruinait le prince et les peuples ; sa clémence aveugle multipliait les prévarications, et les vertus aimables d’un particulier devenaient des vices funestes chez un souverain. Il engagea, durant son absence, le duché de Normandie à l’usurpateur de l’Angleterre[1], pour la faible somme de dix mille marcs ; mais son départ pour la Terre-Sainte, et sa conduite durant la guerre, annoncèrent dans Robert un changement de mœurs, qui lui rendit en quelque façon l’estime publique. Un autre Robert était comte de Flandre, province royale qui a donné dans ce siècle trois reines aux trônes de France, d’Angleterre et de Danemarck. On le surnommait la lance et l’épée des chrétiens ; mais, en se livrant à l’impétuosité d’un soldat, il oubliait quelquefois le devoir d’un général. Étienne, comte de Chartres, de Blois et de Troyes, était un des plus riches princes de son siècle, et l’on comparaît le nombre de ses châteaux aux trois cent soixante-cinq jours de l’année. Il avait enrichi

  1. Guill. Gemeticensis (l. VII, c. 7, p. 672, 673, in Camdem Normannicis). Il engagea le duché pour la centième partie de ce qu’il rapporte aujourd’hui annuellement. Dix mille marcs peuvent s’évaluer à cinq cent mille livres, et la Normandie paye tous les ans au roi cinquante-sept millions (Necker, Administ. des finances, t. I, p. 287).