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gion, et que les musulmans, dont il désire l’alliance, étaient encore nombreux et puissans en Sicile.

Conquête du royaume de la Sicile par l’empereur Henri vi. A. D. 1194.

Falcando vit s’accomplir la première partie de ses espérances, ou du moins de ses désirs. Les Siciliens donnèrent le sceptre, d’une voix unanime, à Tancrède, petit-fils du premier roi, dont la naissance était illégitime, mais dont les vertus civiles et militaires brillaient d’un éclat sans tache. Il passa les quatre années de son règne sur la frontière de la Pouille, où il arrêta l’armée ennemie, et remit aux Allemands une captive du sang royal, Constance elle-même, sans lui faire éprouver aucun mauvais traitement, et sans exiger de rançon ; ce qui passait peut-être la mesure de générosité permise par la politique et par la prudence. Après la mort de Tancrède, sa femme et son fils, en bas âge, tombèrent du trône sans résistance. Henri marcha en vainqueur de Capoue à Palerme. Ses victoires détruisirent l’équilibre de l’Italie ; et si les papes et les cités libres avaient connu leurs véritables intérêts, ils auraient réuni tous les moyens de la terre et du ciel pour empêcher la dangereuse réunion du royaume de Sicile à l’empire d’Allemagne ; mais cette finesse du Vatican, qu’on a louée ou accusée si souvent, fut, en cette occasion, ou aveugle, ou inactive ; et s’il était vrai que Célestin III eût enlevé d’un coup de pied la couronne impériale de dessus la tête de Henri III, prosterné devant lui[1], cet acte d’un orgueil im-

  1. Le témoignage d’un Anglais, de Roger de Hoveden