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illustré ses armes dans la campagne suivante, par la prise de Consenza et de Reggio. Au milieu de l’enthousiasme qu’inspirait son triomphe, il assembla ses troupes et leur demanda de confirmer par leur suffrage le jugement du vicaire de Jésus-Christ : les soldats saluèrent leur valeureux duc par des acclamations de joie ; et les comtes, jusque alors ses égaux, prononcèrent le serment de fidélité avec le sourire sur les lèvres et l’indignation dans le cœur. [Duc de la Pouille. A. D. 1060.]Robert se qualifia dès lors « de duc de la Pouille, de la Calabre et de la Sicile, par la grâce de Dieu et de saint Pierre, » et travailla vingt années à mériter et à réaliser ces titres pompeux : des succès si tardifs dans un pays si peu étendu paraissaient au-dessous des talens du chef et de la nation ; mais les Normands étaient en petit nombre ; ils avaient peu de ressources ; leurs services étaient volontaires et précaires. Les grands desseins du duc furent quelquefois entravés par l’opposition de l’assemblée de ses barons ; les douze comtes élus par le peuple conspirèrent contre son autorité ; et les fils de Humphroy, dénonçant la perfidie de leur oncle, demandèrent justice et vengeance. L’habile Guiscard découvrit leurs complots, étouffa leur rebellion, et condamna les coupables à la mort ou à l’exil ; mais il consuma inutilement ses années et les forces de la nation dans ces querelles domestiques. Lorsqu’il eut mis en déroute ses ennemis du dehors, les Grecs, les Lombards et les Sarrasins, les villes fortifiées de la côte de la mer leur servirent d’asile. Ils excellaient dans l’art des fortifications et celui de la défense ; les