Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 11.djvu/116

Cette page a été validée par deux contributeurs.

dote pourra exciter le sourire au milieu des horreurs de la guerre. Thibaut, marquis de Camerino et de Spolette[1], soutenait les rebelles de Bénévent, et montrait dans sa conduite une cruauté tranquille, qui n’était point alors incompatible avec l’héroïsme. Les captifs de la nation ou du parti des Grecs, qui tombaient entre ses mains, perdaient les organes de la virilité ; et aggravant cet outrage par de cruelles plaisanteries, il se flattait, disait-il, qu’il pourrait présenter à l’empereur une troupe de ces eunuques qui faisaient l’ornement le plus précieux de la cour de Byzance. La garnison d’un château avait été défaite dans une sortie, et les prisonniers condamnés à la mutilation ordinaire. L’exécution fut interrompue par une femme qui se précipita comme une forcenée au milieu des bourreaux, et par ses cris força Thibaut à l’écouter : « Est-ce ainsi, magnanime héros, s’écria-t-elle, que vous déclarez la guerre aux

    buent aux Sarrasins. On dit que dans la guerre de 1756, M. d’Assas, officier du régiment d’Auvergne, se dévoua de la même manière. Sa conduite fut d’autant plus héroïque, que les ennemis qui l’avaient fait prisonnier ne lui demandaient que le silence (Voltaire, siècle de Louis XV, c. 33, t. IX, p. 172).

  1. Thibaut, que Luitprand qualifie de héros, fut, à proprement parler, duc de Spolette et marquis de Camerino, depuis l’année 926 jusqu’à l’année 935. C’étaient les empereurs français qui avaient introduit en Italie le titre et l’emploi de marquis (commandant de la Marche ou de la frontière). Voyez l’Abrégé chronologique, t. II, p. 645-732, etc.