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d’étendard. Ses plus braves disciples qu’avait dispersés l’orage, se rassemblèrent autour de lui ; et ses musulmans, tous égaux en mérite, se distinguèrent par les noms de Mohageriens et d’Ansars les uns fugitifs de la Mecque et les autres auxiliaires de Médine. Pour détruire toute semence de jalousie, il imagina habilement de réunir les principaux d’entre eux deux à deux, en leur accordant les droits et leur imposant les obligations de frères. Après cette disposition, Ali se trouva seul, et le prophète déclara affectueusement qu’il voulait être le compagnon et le frère de ce noble jeune homme. Cet expédient eut un plein succès ; la sainte fraternité fut respectée dans la paix comme dans la guerre, et les deux partis ne cherchèrent à se distinguer que par une généreuse émulation de courage et de fidélité. Une fois seulement une querelle accidentelle troubla légèrement leur union ; un patriote de Médine accusa les étrangers d’insolence ; il laissa entrevoir qu’on pouvait les chasser, mais il ne fut entendu qu’avec horreur, et son fils offrit vivement de porter aux pieds de l’apôtre la tête de son père.

Sa dignité royale. A. D. 622-632.

Du moment où Mahomet fut établi à Médine, il exerça les fonctions de roi et celles de grand-pontife, et ce fut une impiété que de ne pas se soumettre aux décrets d’un juge inspiré par la sagesse divine. Il reçut en don ou il acheta une petite portion de terre appartenant à deux orphelins[1] ; il y bâtit

  1. Prideaux (Vie de Mahomet, p. 44) se répand en