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met[1] se distinguait par sa beauté, avantage extérieur qui n’est guère méprisé que de ceux auxquels il a été refusé. Avant de parler, soit en public, soit en particulier, il disposait en sa faveur. On applaudissait à son maintien qui annonçait l’autorité, à son air majestueux, à son œil perçant, à son agréable sourire, à sa longue barbe, à sa physionomie qui exprimait tous les sentimens de l’âme, et à ses gestes qui donnaient de la force à toutes ses paroles. Dans la familiarité de sa vie privée, il ne s’écartait jamais de la politesse grave et cérémonieuse de son pays ; ses attentions respectueuses pour les riches et les hommes puissans, s’ennoblissaient par sa condescendance et son affabilité envers les citoyens les plus pauvres de la Mecque. La franchise de ses manières cachait l’artifice de ses vues, et son urbanité prenait l’apparence de l’affection pour celui auquel il s’adressait, ou celle d’une bienveillance générale. Sa mémoire était vaste et sûre, son esprit facile et fait pour la société, son imagination sublime et son jugement net, rapide et décisif. Il avait le courage de pensées comme celui d’action ; et, bien qu’il soit vraisemblable que ses desseins s’agrandirent par degrés avec ses succès, la première idée qu’il conçut sur

  1. Abulféda (in Vit., c. 65, 66), Gagnier (Vie de Mahomet, t. III, p. 272-289). Les traditions les plus vraisemblables sur la personne et les conversations du prophète, viennent d’Ayesha, d’Ali et d’Abu Horaira, surnommé le père d’un chat (Gagnier, t. II, p. 267 ; Ockley, Hist. of the Saracens, t. II, p. 149), et qui mourut l’an de l’hégyre 59.