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le monde. Ses douze apôtres se dispersèrent parmi les Bédouins, « race d’hommes, dit Abulféda, également dénuée de raison et de religion » ; et leur succès semblait menacer l’Arabie d’une nouvelle révolution. Les Carmathiens étaient bien disposés à la révolte, puisqu’ils méconnaissaient les titres de la maison Abbas, et qu’ils abhorraient la pompe mondaine des califes de Bagdad. Ils étaient susceptibles de discipline, puisqu’ils avaient juré une soumission aveugle et absolue à leur iman, que la voix de Dieu et celle du peuple appelaient aux fonctions prophétiques. Au lieu des dîmes fixées par la loi, il leur demanda le cinquième de leur propriété et de leur butin ; les actions les plus criminelles n’étaient que le type de la désobéissance, et le serment du secret unissait les rebelles et les dérobait aux recherches. [Leurs exploits militaires. A. D. 900, etc.]Après une sanglante bataille, ils se rendirent maîtres de la province de Bahrein, située le long du golfe Persique : les tribus d’une vaste étendue du désert furent soumises au sceptre ou plutôt au glaive d’Abu-Said et d’Abu-Taher son fils ; et ces rebelles imans purent mettre cent sept mille fanatiques en campagne. Les mercenaires du calife furent épouvantés à l’approche d’un ennemi qui ne demandait et qui ne donnait point de quartier ; la différence de force et de patience qu’on remarquait entre les deux armées annonce le changement que trois siècles de prospérité avaient produit dans le caractère des Arabes. De pareilles troupes étaient battues dans tous les combats les villes de Racca et de Baalbek, de Cufa et