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fut point glorieuse pour les troupes nationales. Les Arabes furent enfoncés ; mais ce fut par les épées de trente mille Persans qui avaient obtenu du service et un établissement dans l’empire grec. Les Grecs furent repoussés et vaincus, mais ce fut par les flèches de la cavalerie turque ; et si une pluie qui tomba le soir n’eût pas mouillé et relâché les cordes de ses arcs, l’empereur aurait pu à peine s’échapper avec un très-petit nombre de chrétiens. L’armée vaincue s’arrêta à Dorylée, ville située à trois journées du champ de bataille. Théophile, en faisant la revue de ses escadrons tremblans, ne put qu’excuser sa fuite et celle de ses sujets. Après cette découverte de sa faiblesse, ce fut en vain qu’il espéra sauver Amorium : l’inexorable calife rejeta avec dédain ses prières et ses promesses ; il retint même ses ambassadeurs pour les rendre témoins de sa vengeance : il s’en fallut peu qu’ils ne fussent témoins de sa honte. Un gouverneur fidèle, une garnison composée de vétérans et un peuple désespéré, soutinrent durant cinquante-cinq jours les vigoureux assauts des musulmans, et les Sarrasins auraient été réduits à lever le siége, si un traître ne leur eût indiqué la partie la plus faible des murailles, facile à reconnaître par la représentation d’un lion et d’un taureau qui se trouvaient placés en cet endroit. Motassem accomplit son vœu dans toute sa rigueur. Fatigué du carnage sans en être rassasié, il retourna au palais de Samara, qu’il venait de bâtir aux environs de Bagdad, tandis que