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foi qu’elle avait jurée à Jésus-Christ et à l’empereur. Lorsqu’elle fut assiégée pour la dernière fois, ses citoyens montrèrent un reste de ce courage qui avait autrefois résisté aux armes d’Athènes et de Carthage. Ils tinrent plus de vingt jours contre les béliers et les catapultes, les mines et les tortues des assiégeans ; et la place aurait pu être secourue, si les matelots de la flotte impériale n’avaient pas été employés à Constantinople à la construction d’une église en l’honneur de la vierge Marie. Le diacre Théodose, ainsi que l’évêque et tout le clergé, furent arrachés des autels, chargés de fers, amenés à Palerme, jetés dans un cachot, et sans cesse exposés au danger d’avoir à choisir entre la mort et l’apostasie. Théodose a écrit sur sa situation un morceau pathétique et qui n’est pas dénué d’élégance : on peut le regarder comme l’épitaphe de son pays[1]. Depuis l’époque où les Romains avaient subjugué la Sicile, jusqu’à la conquête des Sarrasins, Syracuse, maintenant réduite à l’île d’Ortygie, qui forma d’abord sa première enceinte, avait insensiblement vu disparaître son éclat. Cependant elle contenait encore de grandes richesses ; les vases d’argent qu’on trouva dans la cathédrale pesaient cinq mille livres ; le butin fut évalué à un million de pièces d’or, c’est-à-dire à environ quatre cent mille livres sterling, et

  1. Pagi a rapporté et éclairci le récit ou les lamentations de Théodose (Critica, t. III, p. 719, etc.). Constantin Porphyrogenète (in vit Basil., c. 69, 70, p. 190-192) fait mention de la perte de Syracuse et du triomphe des démons.