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dans son Traité sur l’administration de l’empire, les réponses et les excuses au moyen desquelles on peut éluder la curiosité indiscrète et les importunes sollicitations des Barbares. Il recommande de dire qu’un ange a révélé le mystère du feu grégeois au premier et au plus grand des Constantin, en lui ordonnant d’une manière expresse de ne jamais communiquer aux nations étrangères ce don du ciel et cette grâce particulière accordés aux Romains ; que le prince et les sujets sont également obligés de garder sur ce point un silence religieux, auquel ils ne peuvent manquer sans s’exposer aux peines temporelles et spirituelles réservées à la trahison et au sacrilége ; qu’une pareille impiété attirerait sur-le-champ, sur le coupable, la vengeance miraculeuse du Dieu des chrétiens. Ces précautions rendirent les Romains de l’Orient maîtres de leur secret durant quatre siècles, et à la fin du onzième, les Pisans, accoutumés à toutes les mers et instruits dans tous les arts, se virent foudroyés par le feu grégeois sans en pouvoir deviner la composition. À la fin les musulmans le découvrirent ou le dérobèrent, et, dans les guerres de la Syrie et de l’Égypte, firent retomber sur les chrétiens le moyen que ceux-ci avaient inventé contre eux. Un chevalier qui méprisait les glaives et les lances des Sarrasins, raconte de bonne foi ses frayeurs et celles de ses compagnons À la vue et au bruit de la funeste machine qui vomissait des torrens de feu grégeois, comme le nomment encore les écrivains