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avec le reste des forces de l’Orient. Un parent et un ennemi de Moslemah remplaça Soliman, et les inutiles et funestes vertus d’un bigot déshonorèrent le trône d’un prince rempli d’activité et de talens. Tandis qu’Omar, le nouveau calife, s’occupait à calmer et à satisfaire les scrupules de son aveugle conscience, sa négligence plutôt que sa résolution laissait continuer le siége pendant l’hiver[1]. Cet hiver fut extraordinairement rigoureux. Une neige profonde couvrit la terre durant plus de cent jours, et les naturels des climats brûlans de l’Égypte et de l’Arabie demeurèrent engourdis et presque sans vie dans leur camp glacé. Ils se ranimèrent au retour du printemps ; on avait fait pour eux un second effort ; ils reçurent deux flottes nombreuses chargées de blé, d’armes et de soldats ; la première, de quatre cents transports et galères, venait d’Alexandrie ; et la seconde, de trois cent soixante navires, venait des ports de l’Afrique. Mais les terribles feux des Grecs se rallumèrent de nouveau, et si la destruction fut moins complète, ce fut parce que l’expérience

  1. Voyez, l’article d’Omar Ben-Abdalaziz, dans la Bibliothéque orientale (p. 689, 690) ; præferens, dit Elmacin (p. 91), religionem suam rebus suis mundanis. Il désirait si fort de se rendre auprès de la divinité, qu’on l’entendit un jour assurer qu’il ne se donnerait pas la peine de frotter d’huile son oreille pour guérir de sa dernière maladie. Il n’avait qu’une chemise, et à une époque où le luxe s’était introduit parmi les Arabes, il ne dépensait pas plus de deux drachmes par année (Abulpharage, p. 131) ; haud diu gavisus eo principe fuit orbis Moslemus (Abulf., p. 127).