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Tolérance religieuse.

Le prophète avait consacré les guerres des musulmans ; mais parmi les préceptes divers et les exemples qu’il avait donnés durant sa vie, les califes choisirent les leçons de tolérance les plus propres à prévenir la résistance des incrédules. L’Arabie était toujours le sanctuaire et le patrimoine du Dieu de Mahomet ; mais il voyait d’un œil moins affectueux et moins jaloux les autres nations de la terre. Ses adorateurs se croyaient autorisés à donner la mort aux polythéistes et aux idolâtres qui ignoraient son nom[1] ; mais de sages vues de politique suppléèrent bientôt pour eux aux principes de la justice ; et après quelques actes d’un zèle intolérant, les musulmans qui

    tomus posterior, 1770. L’exécution de cet ouvrage fait honneur aux presses d’Espagne ; l’éditeur y indique dix-huit cent cinquante-un manuscrits classés d’une manière judicieuse ; et ses longs extraits jettent quelque jour sur la littérature musulmane et l’histoire d’Espagne. On n’a plus à craindre la perte de ces monumens ; mais c’est par une négligence inconcevable qu’on n’a pas fait ce travail avant l’année 1671, époque où un incendie consuma la plus grande partie de la Bibliothéque de l’Escurial, riche alors des dépouilles de Grenade et de Maroc.

  1. Les Harbii, ainsi qu’on les appelle, qui tolerari nequeunt, sont, 1o. ceux qui ne se bornent pas à adorer Dieu, mais qui adorent encore le soleil, la lune ou les idoles ; 2o. les athées, utrique, quamdin princeps aliquis inter Mohammedanos superest, oppugnari debent donec religionem amplectantur, nec requies iis concedenda est, nec pretium acceptandum pro obtinendâ conscientiæ libertate (Reland, Dissert. 10, De Jure militari Mahommedan., t. III, p. 14). Quelle sévère théorie !