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réduits en captivité. Soixante mille de ces captifs, mis à part pour le cinquième du calife, furent vendus au profit du trésor ; trente mille jeunes gens furent enrôlés dans les troupes ; et les pieux travaux de Musa, qui ne cessa de s’occuper du soin d’inculquer aux vaincus les lumières et la pratique du Koran, habituèrent les Africains à obéir à l’apôtre de Dieu et au commandeur des fidèles. Par le climat qu’ils habitaient et leur gouvernement, par leur régime et le genre de leurs habitations, les Maures errans ressemblaient aux Bedoins du désert ; en adoptant la religion de Mahomet, leur orgueil se plut à adopter la langue, le nom et l’origine des Arabes ; [Adoption des Maures.]le sang des étrangers et celui des naturels du pays se mêlèrent insensiblement, et il sembla alors que la même nation se fût répandue de l’Euphrate à l’Atlantique, sur les plaines sablonneuses de l’Asie et de l’Afrique. Au reste, je conviens que cinquante mille tentes de purs Arabes ont pu traverser le Nil et se disperser dans le désert de la Libye, et je sais que cinq tribus mauresques conservent encore aujourd’hui leur idiome barbaresque, et qu’elles portent le nom et le caractère d’Africains blancs[1].

  1. Le premier livre de Léon l’Africain et les Observations du docteur Shaw (p. 220, 223, 227, 247, etc.) jetteront du jour sur celles des tribus errantes de la Barbarie qui descendent des Arabes ou des Maures. Mais Shaw s’était tenu à une respectueuse distance de ces sauvages ; et il semble que Léon, captif à Rome, oublia en Italie ce qu’il savait de la littérature arabe, plus qu’il n’acquit de lumières