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leurs ancêtres. Voilà ce que disent les modernes Arabes ; mais je suis fortement disposé à croire que c’est par ignorance de l’antiquité, par amour du merveilleux, et par cette habitude, devenue une espèce de mode, d’exagérer la philosophie des Barbares, qu’ils ont représenté comme un acte volontaire les calamités et les dévastations de trois siècles, à compter des premières fureurs des donatistes et des Vandales. Dans le cours de la révolte, il est vraisemblable que Cahina contribua, pour sa part, à la dévastation ; et peut-être que la crainte de se voir ruinées épouvanta ou indisposa les villes qui s’étaient soumises malgré elles au joug d’une femme. Les colons n’espéraient plus, peut-être même ne désiraient-ils plus le retour du souverain qui régnait à Byzance ; les avantages de l’ordre et de la justice n’adoucissaient pas leur servitude, et les plus zélés d’entre les catholiques devaient préférer les vérités imparfaites du Koran à l’aveugle et grossière idolâtrie des Maures. Le général des Sarrasins fut donc accueilli une seconde fois comme le sauveur de la province : les amis de la civilisation conspirèrent contre les sauvages de cette partie du monde ; Cahina fut tuée dès la première bataille, et avec elle tomba l’édifice mal affermi de son empire et de la superstition qui le soutenait. Le même esprit de révolte se ralluma sous le successeur de Hassan ; il fut enfin étouffé par l’activité de Musa et de ses deux fils ; mais on peut juger du nombre des rebelles par celui de trois cent mille d’entre eux qui furent