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vainqueur de la Perse et de la Syrie montait un chameau de poil roux, sur lequel on avait placé aussi un sac de blé, un second sac plein de dattes, un plat de bois, et une bouteille de cuir remplie d’eau. Dès qu’il s’arrêtait, tous ceux qui se trouvaient autour de lui étaient invités, sans aucune distinction, à partager son frugal repas, qu’il consacrait par des prières et une exhortation[1]. En même temps, dans tout le cours de cette expédition ou de ce pèlerinage, il usait de son pouvoir en administrant la justice : il mettait des bornes à la polygamie licencieuse des Arabes ; il réprimait les extorsions et les cruautés qu’on se permettait envers les tributaires ; et pour punir les Sarrasins de leur luxe, il les dépouillait de leurs riches robes de soie, et leur traînait le visage dans la boue. Du moment où il aperçut Jérusalem, il s’écria à haute voix : « Dieu est victorieux ! Seigneur, rends-nous cette conquête facile ; » et après avoir dressé sa tente d’étoffe grossière, il s’assit tranquillement sur la terre. Dès qu’il eut signé la capitulation, il entra dans la ville sans précaution et sans crainte, et s’entretint poliment avec le patriarche sur les antiquités religieuses de son église[2].

  1. Ockley (vol. I, p. 256) et Murtadi (Merveilles de l’Égypte, p. 200-202) nous font connaître ce singulier voyage et l’équipage d’Omar.
  2. Les Arabes citent avec orgueil une ancienne prophétie conservée à Jérusalem, qui désignait Omar par son nom, sa religion et la description de sa personne, comme étant destiné à conquérir cette ville. On dit que les Juifs