Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 10.djvu/206

Cette page a été validée par deux contributeurs.

d’eau[1], et Caled récita la prière du matin avant de les faire monter à cheval. Le peuple de Bosra, plein de confiance dans ses forces, ouvrit les portes, rangea son armée dans la plaine, et jura de mourir pour la défense de sa religion. Mais une religion de paix ne pouvait résister à ce cri forcené : « Au combat ! au combat ! le paradis ! le paradis ! » qui retentissait de toutes parts au milieu des lignes des Sarrasins : le tumulte de la ville, le son des cloches[2], les exclamations des prêtres et des moines augmentaient l’épouvante et le désordre des chrétiens. Les Arabes ne perdirent que deux cent trente hommes, et demeurèrent les maîtres du champ de bataille ; soit pour attirer les secours du ciel ou ceux de la terre, les remparts de Bosra furent couverts

  1. Mahomet, qui prêchait sa religion dans un désert et à des guerriers, fut obligé de permettre qu’on fit les ablutions avec du sable lorsqu’on manquait d’eau (Koran, c. 3, p. 66 ; c. 5, p. 83) ; mais les casuistes arabes et persans ont embarrassé cette permission pure et simple d’une foule de délicatesses et de distinctions. (Reland, De relig. Moham., l. I, p. 82, 83 ; Chardin, Voyages en Perse, t. IV.)
  2. Les cloches sonnèrent ! (Ockley, t. I, p. 38.) Mais je doute beaucoup que le texte de Al-Wakidi ou l’usage du temps puisse justifier cette expression. Ad Græcos, dit le savant Ducange (Gloss. med. et infim. græcit., t. I, p. 774), campanarum usus, serius transit et etiamnum rarissimus est. L’époque la plus ancienne où les écrivains de Byzance fassent mention des cloches, se rapporte à l’année 1040 ; mais les Vénitiens prétendent avoir introduit des cloches à Constantinople dès le neuvième siècle.