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joyeuses du paganisme qu’avaient professé leurs ancêtres. Un système d’union et de subordination n’avait pas encore apaisé le choc des intérêts et les querelles héréditaires des tribus arabes ; les Barbares ne pouvaient s’assujettir aux lois, même les plus douces et les plus salutaires, dès qu’elles asservissaient leurs passions ou qu’elles violaient leurs coutumes. Ils s’étaient soumis avec répugnance aux préceptes religieux du Koran, à la privation du vin, au jeûne du Ramadan, et aux cinq prières de chaque jour ; et sous un autre nom ils ne voyaient dans les aumônes et les dîmes qu’on recueillait pour le trésor de Médine, qu’un tribut perpétuel et ignominieux. L’exemple de Mahomet avait excité un esprit de fanatisme et d’imposture, et durant sa vie plusieurs de ses rivaux avaient osé imiter sa conduite et braver son autorité. Le premier calife avec ses fugitifs et ses auxiliaires se vit réduit aux villes de la Mecque, de Médine et de Tayef, et il paraît que les Koreishites auraient rétabli les idoles de la Caaba, s’il n’eût pas contenu leur légèreté par ce reproche : « Hommes de la Mecque, leur dit-il, voulez-vous être les derniers à embrasser l’islamisme, et les premiers à l’abandonner ? » Après avoir exhorté les musulmans à compter sur le secours de Dieu et de son apôtre, Abubeker résolut de prévenir les jonctions des rebelles par une attaque vigoureuse. Il retira les femmes et les enfans dans les cavernes et les montagnes ; ses guerriers marchèrent sous onze drapeaux ; ils répandirent la terreur de leurs armes, et