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ment de la guerre dans la balance exacte de la raison et de la politique. Il savait trop bien qu’une seule ville ne pouvait résister aux efforts constans d’une grande armée, et il craignait que l’ennemi, fatigué de la résistance opiniâtre des assiégés, n’abandonnât subitement un siége inutile, et ne marchât droit à Rome. Le destin de l’empire et la cause de la liberté auraient été alors remis au hasard d’une bataille ; et quelle armée avait-il à opposer aux redoutables vétérans du Rhin et du Danube ? quelques troupes nouvellement levées parmi la jeunesse italienne, remplie d’une noble ardeur, mais énervée par le luxe, et un corps de Germains auxiliaires, sur la fermeté duquel il eût été dangereux de compter dans la chaleur du combat. Au milieu de ces justes alarmes, une conspiration secrète punit les crimes de Maximin, et délivra Rome des calamités qui auraient certainement suivi la victoire d’un barbare furieux.

Meurtre de Maximin et de son fils. A. D. 238, avril.

Jusque alors le peuple d’Aquilée avait à peine éprouvé quelques maux inséparables d’un siége ; ses magasins étaient abondamment pourvus, et plusieurs fontaines d’eau douce renfermées dans l’enceinte de la place assuraient aux habitans des ressources inépuisables. Les soldats de Maximin, au contraire, exposés à toutes les inclémences de l’air, désolés par une maladie contagieuse, se voyaient encore en proie aux horreurs de la famine. Partout aux environs les campagnes étaient dévastées, les fleuves souillés de sang et remplis de cadavres ; le désespoir et le découragement commençaient à s’emparer des