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faire éprouver toute sa rage, il voulait, dans les premiers mouvemens d’une fureur aveugle, souiller ses mains du sang de son fils, de ses amis et de tous ceux qui osaient l’approcher. Il s’applaudissait à peine de la chute précipitée des Gordiens, lorsqu’il apprit que les sénateurs, renonçant à tout espoir de pardon, avaient élu de nouveau deux princes dont il ne pouvait ignorer le mérite. La vengeance était la dernière ressource de Maximin, et les armes seules pouvaient lui procurer cette unique consolation : il se trouvait à la tête des meilleures légions romaines, qu’Alexandre avait rassemblées de toutes les parties de l’empire. Trois campagnes heureuses, contre les Sarmates et contre les Germains, avaient élevé leur réputation, exercé leur discipline, et augmenté même leur nombre, en remplissant leurs rangs d’une foule de jeunes Barbares. Maximin avait passé sa vie dans les camps ; et l’histoire ne peut lui refuser la valeur d’un soldat, ni même les talens d’un général expérimenté[1]. Il était à présumer qu’un prince de ce caractère, au lieu de laisser à la rebellion le temps de se fortifier, se transporterait sur-le-champ des rives du Danube aux bords du Tibre, et que son armée victorieuse, pleine de mépris pour le sénat, et impatiente de s’emparer des dépouilles de l’Italie,

  1. Dans Hérodien, l. VII, p. 249, et dans l’Hist. Aug., nous avons trois harangues différentes de Maximin à son armée, sur la rebellion d’Afrique et de Rome. M. de Tillemont a très-bien observé qu’elles ne s’accordent ni entre elles ni avec la vérité. Hist. des empereurs, t. III, p. 799.