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DE L’EMPIRE ROMAIN. CHAP. V.

ensuite de rendre à ce prince les honneurs dus à sa mémoire. Avant d’entrer dans Rome, le nouvel empereur commanda aux prétoriens d’attendre son arrivée dans une grande plaine près de la ville, et de s’y rendre sans armes, mais avec les habits de cérémonie dont ils étaient revêtus lorsqu’ils accompagnaient le souverain. Ces troupes hautaines, moins touchées de repentir que frappées d’une juste terreur, obéirent à ses ordres. Aussitôt un détachement choisi de l’armée d’Illyrie les environna l’épée tournée contre eux. La résistance ou la fuite devenait impossible ; et les prétoriens attendaient leur sort en silence et dans la consternation. L’empereur, monté sur son tribunal, leur reprocha sévèrement leur perfidie et leur lâcheté, les cassa avec ignominie, les dépouilla de leurs magnifiques ornemens, et leur défendit, sous peine de mort, de paraître à la distance de cent milles de Rome. Pendant cette exécution, d’autres troupes avaient reçu ordre de s’emparer de leurs armes, d’occuper leur camp fortifié, et de prévenir les suites funestes de leur désespoir[1].

Funérailles et apothéose de Pertinax.

On célébra ensuite les funérailles de Pertinax avec toute la magnificence dont était susceptible cette triste cérémonie[2]. Le sénat rendit, avec un plaisir mêlé d’amertume, les derniers devoirs à cet excellent

  1. Dion, l. LXXIV, p. 1241 ; Hérodien, l. II, p. 84.
  2. Dion, qui assista à cette cérémonie, comme sénateur, en donne une description très-pompeuse, l. LXXIV, p. 1244