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HISTOIRE DE LA DÉCADENCE

tissaient de clameurs et d’imprécations ; la multitude furieuse insultait la personne de Julianus, rejetait ses libéralités, et, trop faible pour entreprendre une révolution, elle appelait à grands cris les légions des frontières, et les invitait à venir venger la majesté de l’empire.

Les armées de Bretagne, de Syrie et de Pannonie se déclarent contre Julianus.

Le mécontentement public passa bientôt du centre aux extrémités de l’état. Les armées de Bretagne, de Syrie et d’Illyrie déplorèrent la mort de Pertinax, avec lequel elles avaient tant de fois combattu, et qui les avait si souvent menées à la victoire. Elles apprirent avec surprise, avec indignation, peut-être même avec jalousie, cette étrange nouvelle, que l’empire avait été publiquement mis à l’enchère par les prétoriens, et elles refusèrent avec hauteur de ratifier cet indigne marché. Leur révolte prompte et unanime entraîna la perte de Julianus et troubla la tranquillité de l’état. Clodius-Albinus, Pescennius-Niger et Septime-Sévère, qui commandaient ces différentes armées, furent plus empressés de succéder à Pertinax que de venger sa mort. Les forces de ces trois rivaux étaient égales ; ils se trouvaient chacun à la tête de trois légions et d’un corps nombreux d’auxiliaires[1] ; et quoique d’un caractère différent, ils joignaient tous à la valeur du soldat les talens et l’expérience du général.

Clodius-Albinus en Bretagne.

Clodius-Albinus, gouverneur de la Grande-Bretagne, l’emportait sur ses deux compétiteurs par

  1. Dion, l. LXXIII, p. 1235.