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HISTOIRE DE LA DÉCADENCE

A. D. 138-180.

Antonin-le-Pieux avait deux fils[1] ; mais il préférait Rome à sa famille[2]. Après avoir donné sa fille Faustine en mariage au jeune Marcus, il engagea le sénat à lui accorder les dignités de proconsul et de tribun ; enfin, s’élevant noblement au-dessus de toute jalousie, ou plutôt incapable d’en ressentir, il l’associa, par un noble désintéressement, à tous les travaux de l’administration. De son côté, Marc-Aurèle respecta son bienfaiteur, le chérit comme un père, et lui obéit comme à son souverain[3] ; et lorsqu’il tint seul les rênes de l’état, il s’empressa de marcher sur ses traces, et d’adopter les maximes d’un si grand prince. Ces deux règnes sont peut-être la seule période de l’histoire, dans

  1. Sans le secours des médailles et des inscriptions, nous ignorerions cette action d’Antonin-le-Pieux, qui fait tant d’honneur à sa mémoire.
  2. Gibbon attribue à Antonin-le-Pieux un mérite qu’il n’eut pas, ou que, du moins, il ne fut pas dans le cas de montrer : 1o. il n’avait été adopté que sous la condition qu’il adopterait à son tour M. Aurèle et L. Verus ; 2o. ses deux fils moururent enfans, et l’un d’eux, M. Galerius, paraît seul avoir survécu de quelques années au couronnement de son père. Gibbon se trompe aussi lorsqu’il dit (note 1) que sans le secours des médailles et des inscriptions, nous ignorerions qu’Antonin avait deux fils. Capitolin dit expressément (c. 1) : Filii mares duo, duæ fœminæ : nous ne devons aux médailles que leurs noms. (Pagi Critic. Baron., ad. A. C. 161, tom. I, p. 33, éd. Paris.) (Note de l’Éditeur.)
  3. Pendant les vingt-trois années du règne d’Antonin, Marc-Aurèle ne fut que deux nuits absent du palais, et même à deux fois différentes. (Histoire Auguste. p. 25.)