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DE L’EMPIRE ROMAIN. CHAP. III.

Ce tribunal décidait en dernier ressort de toutes les affaires civiles : quant au criminel, il connaissait des prévarications commises par les hommes en place, et des délits qui intéressaient la tranquillité ou la majesté du peuple romain. L’exercice du pouvoir judiciaire devint la plus habituelle et la plus sérieuse des occupations du sénat. Les causes importantes ouvraient une carrière brillante aux grands orateurs : c’était le dernier asile où venait se réfugier l’ancien génie de l’éloquence. Comme conseil de la nation et comme cour de justice, le sénat jouissait de prérogatives très-considérables ; tandis qu’en sa qualité de corps législatif, il était supposé représenter le peuple, et paraissait avoir conservé les droits de la souveraineté. Les lois recevaient leur sanction de ses décrets : toute puissance était dérivée de son autorité. Il s’assemblait régulièrement trois fois par mois, aux calendes, aux nones et aux ides. On discutait les affaires avec une honnête liberté ; et les empereurs, qui se glorifiaient du titre de sénateur, prenaient séance, donnaient leur voix, et se confondaient avec leurs égaux.

Idée générale du système impérial.

Résumons en peu de mots le système du gouvernement impérial institué par Auguste et maintenu par ceux de ses successeurs qui connurent leurs véritables intérêts et ceux du peuple : c’était une monarchie absolue, revêtue de toute la forme d’une république. Les souverains de ce vaste état plaçaient leur trône au milieu des nuages. Soigneux de dérober aux yeux de leurs sujets leur force irrésistible,