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Portier des Chartreux.


celle des tourmens dont leur perte vous accable.

Martin, comme je te l’ai dit, pouvoit paſſer pour une fille jolie ſous ſon habillement. L’ingrat Verland, hélas ! Pourquoi le traiter d’ingrat, n’étois-je pas moi-même la premiere coupable, & ſi mon inconſtance étoit inconnuë, mon cœur en étoit-il moins criminel ? Verland trouva des charmes à ma prétenduë femme de chambre, & négligea ſa Maîtreſſe. Dédomagé par les plaiſirs de la nuit, je ne m’étois pas encore aperçûë du vuide que l’indifférence de Verland commençoit à mettre dans ceux du jour. Mes jeûnes ſe multiplioient ſenſiblement : Verland poſſédoit ſi bien l’art de me perſuader, que je me croyois trop heureuſe qu’il voulut bien m’alléguer des motifs de ſon abſence ; je voulois quelquefois le gronder, il paroiſſoit, un ſourire, un baiſer, une careſſe, faiſoient évanoüir ma colere. Un jour de repos me le rendoit plus vigoureux ; il en vint juſqu’à me faire croire que l’intérêt de notre plaiſir rendoit ſes abſences néceſſaires : j’y conſentis, & l’infatigable Martin rempliſſoit ces jours de relâche.

Hier, jour infortuné, & dont je ne

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