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Histoire de Dom B…

J’étois perſuadée que ſi Verland étoit ſincére, il trouveroit facilement l’occaſion de m’en donner de nouvelles aſſûrances. Il pénétra le motif de ma retraite, & n’affecta pas de la troubler par une obſtination qui pourroit me déplaire : il me laiſſa partir en ſoûriant, j’entendis ſes ſoupirs, & les miens lui repondoient au fond de mon cœur,

Que te dirai-je ? Une ſeconde entrevûë lui valut l’aveu d’une tendreſſe reciproque, & mon conſentement aux demarches, qu’il me demanda la permiſſion de faire auprès de ma mere, pour en obtenir ma main ; elle la refuſa, j’en fus au déſeſpoir, ſon refus irrita mon amour ; Verland en étoit accablé : nous nous étions ôté, par une démarche imprudente toute eſpérance, & pour comble d’horreur, ma mere étoit devenuë ma rivale. Elle ſe trahit elle-même par les éloges continuels qu’elle faiſoit de Verland. Le caractere de Devote qu’il falloit ſoûtenir, m’ôtoit la liberté de lui demander la raiſon du refus qu’elle avoit fait d’un homme à qui elle trouvoit tant de perfections ; ainſi, triſte victime de la devotion & de l’amour, j’étois réduite à la dure néceſſité de devorer ma