OROSMANE
Ô fils, qui n'es plus fils, je lis dans ta pensée !
J'y vois ta violence, et ta flamme insensée ;
Tu portes sur le front ton injuste désir,
Les marques de ton crime, et de ton déplaisir. [795]
Tu crois ne rien gagner, si tu perds Polixène ;
Ta voix en nous flattant, est un chant de Sirène ;
Tu crois nous endormir, par des termes si doux,
Surprendre notre esprit, et te moquer de nous.
Mais apprends inhumain, que je sais ta malice ; [800]
Que ma raison voit clair, dans ce noir artifice ;
Et que pour découvrir ce que tu veux savoir,
Ta plus grande fureur manquerait de pouvoir.
Je sais bien, ô cruel, que ta rage est extrême ;
Mais arme tes bourreaux, ou sois bourreau toi-même. [805]
Applique à la torture, un prince malheureux ;
Sois inhumain, sois tigre, il sera généreux.
TIRIDATE
Quoi donc, j'aurai perdu le fruit de tant de peine ?
Et bien, soit, il est vrai, j'adore Polixène :
Je ne veux plus cacher que j'en suis enflammé ; [810]
Cet objet est trop beau pour n'être pas aimé ;
J'ai des yeux, elle est belle, autant qu'il est possible ;