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Non, non, mes filles non, la chose est résolue ;

Et le destin le veut de puissance absolue ; [745]

Il faut que je me perde, après avoir perdu

Un trésor, qui jamais ne peut m'être rendu ;

Il faut que je me venge, et que je me punisse ;

Que Tiridate meure, et qu'après je finisse.

               Il lui montre son poignard.

Voyez ce fer sanglant que je porte en la main, [750]

Par lui j'ai fait un coup juste, mais inhumain :

Par lui j'ai fait périr une beauté si rare,

Amant infortuné, mais beaucoup plus barbare.

Ô main ! Cruelle main, que la fureur arma,

Toi main, qui fais périr, ce que le coeur aima ; [755]

Qui viens d'ouvrir le sein de la personne aimée,

De quels feux violents seras-tu consommée ?

Et puisque c'est par toi qu'un astre a pû finir ?

Est-il quelque brasier qui te puisse punir !

Noires filles d'enfer, abandonnez vos gouffres, [760]

Apportez en ces lieux vos flammes, et vos souffres,

Venez, venez à moi ; quittez vos criminels,

Mon crime est infini, vos feux sont éternels ;

Pour venger sur ma main l'innocence opprimée,

Qu'elle brûle toujours, sans être consommée. [765]